Le 6 février marque la Journée internationale de tolérance zéro à l’égard des mutilations génitales féminines (MGF). Au Mali, où 89 % des femmes de 15 à 49 ans, selon la VIe Enquête Démographique et de Santé (2018), ont subi cette pratique, il est crucial de sensibiliser la population sur les conséquences néfastes des MGF et de promouvoir le changement.
Les Mutilations Génitales Féminines : Une Pratique Ancrée dans la Culture

Les mutilations génitales féminines, qui englobent diverses interventions sur les organes génitaux féminins pour des raisons non médicales, sont profondément enracinées dans les traditions culturelles et sociales au Mali. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ces pratiques sont classées en quatre types :
- Type I : Ablation partielle ou totale du clitoris.
- Type II : Ablation du clitoris et des petites lèvres.
- Type III : Rétrécissement de l’orifice vaginal.
- Type IV : Autres interventions nuisibles.
Ces pratiques sont souvent justifiées par des croyances liées à la nécessité de préserver l’honneur familial, de contrôler la sexualité féminine et d’assurer la virginité avant le mariage. Dans de nombreuses communautés, une fille non excisée est stigmatisée et considérée comme « impure » ou « non initiée », ce qui peut avoir des conséquences sociales graves, y compris l’impossibilité de se marier. « Dans ma belle-famille, l’excision est considérée comme une pratique obligatoire. Lorsque j’ai accouché, je me suis opposée à ce qu’ils le fassent à ma fille. Malheureusement, je n’ai pas pu m’y opposer, car ma belle-mère m’a dit que c’était une tradition chez eux, bien avant ma naissance. Elle a donc emmené ma fille avec l’accord de mon mari. Bien qu’il partage mon avis, il dit qu’il ne peut rien faire contre la tradition. Ainsi, notre fille a été excisée contre notre volonté, au nom de la culture et des traditions », nous confie Mariam Keïta.
Conséquences des MGF : un impact dévastateur
Les conséquences des mutilations génitales féminines sont à la fois immédiates et à long terme. Les complications immédiates incluent des douleurs intenses, des infections et des hémorragies. À long terme, les femmes peuvent souffrir de problèmes de santé tels que des infections urinaires, des complications pendant l’accouchement, des difficultés psychologiques, y compris la dépression et le stress post-traumatique, ainsi que des problèmes sexuels. « Les mutilations génitales féminines affectent d’amont en aval la santé de la reproduction », a indiqué BRÉHIMA BALLO, chargé des programmes de l’ONG AMSOPT. Il ajoute que parmi les conséquences, on peut citer :
– l’hémorragie pouvant aboutir à la mort,
– l’anémie provoquée par l’hémorragie,
– les infections, y compris le VIH et l’hépatite B,
– les difficultés à l’accouchement,
– les fistules obstétricales,
– les douleurs pendant les règles,
– les douleurs pendant les rapports sexuels,
– les kystes dermoïdes,
– etc.
– La liste n’est pas exhaustive.
Les professionnels de la santé peuvent jouer dans la sensibilisation et la prévention de cette pratique, il souligne que « les agents de santé ont un rôle prépondérant dans la sensibilisation et aussi dans la prise en charge et réparation des conséquences de l’excision ». Le Ministère de la Santé a signé un arrêté ministériel interdisant la pratique de l’excision en milieu médical. Les agents de santé constituent un repère pour les membres de la communauté quant à l’abandon de cette pratique. Ils concourent à faire la sensibilisation pendant les CPN et à la prise en charge médicale et psychosociale des femmes survivantes des complications de l’excision.
Aminata Sangaré, victime de mutilations génitales féminines, a accepté de partager son expérience poignante afin de sensibiliser sur les conséquences durables de cette pratique. « J’ai subi une mutilation génitale à l’âge de 10 ans, et cela a marqué ma vie à jamais. La douleur physique était insupportable, mais ce qui m’a le plus affectée, ce sont les conséquences émotionnelles. À 32 ans aujourd’hui, je ressens encore des douleurs lors de mes rapports avec mon mari, ce qui impacte notre relation. Je me sens souvent incomprise et isolée », déclare-t-elle. Pour elle, partager son histoire pour sensibiliser d’autres familles et les encourager à protéger leurs filles est un devoir, car « chaque fille mérite de grandir sans peur et de vivre pleinement sa vie ».
Les coûts économiques associés aux soins médicaux des complications liées aux mutilations génitales féminines sont considérables. Selon une estimation de l’Organisation mondiale de la santé, les coûts directs et indirects de la prise en charge des complications liées aux MGF s’élèvent à plus de 17 millions de dollars par an au Mali.
L’Importance de l’Éducation et de la Sensibilisation
Pour mettre fin à cette pratique néfaste, il est essentiel de promouvoir l’éducation et la sensibilisation au sein des communautés. Des campagnes d’information visant à expliquer les conséquences des MGF, ainsi que les droits fondamentaux des filles et des femmes, peuvent contribuer à changer les mentalités. Les leaders communautaires, les enseignants et les professionnels de la santé jouent un rôle crucial dans cette lutte. En impliquant les hommes dans la discussion, on peut également aborder les normes de genre qui perpétuent ces pratiques.
Pour un avenir sain et digne, protégeons nos filles des mutilations génitales féminines.
Il est impératif d’éduquer les communautés sur les dangers des mutilations génitales féminines et de promouvoir des alternatives culturelles. Ensemble, nous pouvons mettre fin à cette pratique néfaste et garantir à chaque fille le droit de vivre en toute sécurité et dignité.
Koumba Coulibaly